Commentaire de trois tableaux
Raphaël, Rubens et Armand de Polignac nous offrent trois représentations de la Justice. Ils retracent une évolution de la conception de la justice : à l’origine considérée comme divine, la Révolution française de 1789 bouleversera cette conception. Mais ils montrent également que la justice ne se limite pas à trancher : c’est un ensemble de vertus entremêlées qui fera que celui qui rendra la justice le fera équitablement.
LA JUSTICE, Raphaël (Vatican 1510)
L’iconographie a eu un engouement pour la représentation de la Justice sous diverses formes. Raphaël nous en donne ici un magnifique tableau. Dans l’antiquité grecque, Thémis (déesse de la loi éternelle), a engendré de ses amours avec Zeus, des divinités qui incarnent les vertus du droit : Eunomia (la discipline), Eiréné (la paix) et Diké (la justice).
Il est évident que Diké conserve une certaine connotation divine. Dans le tableau de Raphaël, elle est assise sur un nuage, au royaume des dieux et fait ainsi le pont entre son monde (celui des dieux), et celui des hommes. Le temps est ici suspendu, le tableau nous replace dans le temps éternel, illimité de la justice. Le temps de l’homme est lui différent, dans la mesure où l’homme vit dans les limites du présent. Mais la justice du haut des cieux, doit régner sur la totalité du monde, sans limite temporelle. De même, la justice s’organise dans un espace ouvert car celui-ci se confond avec l’espace de la souveraineté. C’est là une invitation à une justice de plein air, accessible à tous, dont la publicité se trouve naturellement garantie.
Il convient de noter l’usage de termes latins, sur les plaques de marbre soutenus par les chérubins, de part et d’autre de la Justice. Cette utilisation d’une langue morte et sacrée, place le discours de la justice hors de la vie ordinaire. La Justice s’apprête à trancher un différend qu’il ne nous est pas donné de voir. Diké tient le glaive de la justice de la main