CORPUS THEATRE EXCES 1
CORPUS :
1. P. Corneille, Horace, acte IV, scène 5, extrait, 1640
2. V. Hugo, Hernani, acte II, scène 4, extrait, 1830
3. J. Giraudoux, Electre, acte II, scène 8, extrait, 1937
Annexe : D. Diderot, Paradoxe sur le comédien, 1773
TEXTE 1 – Pierre Corneille, Horace, acte IV, scène 5, extrait, 1640
Camille, romaine et sœur d’Horace, aime Curiace qui vient de mourir de la main d’Horace.
CAMILLE
Donne-moi donc, barbare, un cœur comme le tien ;
Et si tu veux enfin que je t’ouvre mon âme,
Rends-moi mon Curiace, ou laisse agir ma flamme :
Ma joie et mes douleurs dépendaient de son sort ;
5 Je l’adorais vivant, et je le pleure mort.
Ne cherche plus ta sœur où tu l’avais laissée ;
Tu ne revois en moi qu’une amante offensée,
Qui comme une Furie (1) attachée à tes pas,
Te veut incessamment reprocher son trépas.
10 Tigre altéré de sang, qui me défends les larmes,
Qui veux que dans sa mort je trouve encor des charmes,
Et que jusques au ciel élevant tes exploits,
Moi-même je le tue une seconde fois !
Puissent tant de malheurs accompagner ta vie,
15 Que tu tombes au point de me porter envie ;
Et toi, bientôt souiller par quelque lâcheté
Cette gloire si chère à ta brutalité !
HORACE
Ô ciel ! Qui vit jamais une pareille rage !
Crois-tu donc que je sois insensible à l’outrage,
20 Que je souffre en mon sang ce mortel déshonneur ?
Aime, aime cette mort qui fait notre bonheur,
Et préfère du moins au souvenir d’un homme
Ce que doit ta naissance aux intérêts de Rome.
CAMILLE
Rome, unique objet de mon ressentiment !
25 Rome, à qui vient ton bras d’immoler mon amant !
Rome qui t’a vu naître, et que ton cœur adore !
Rome enfin que je hais parce qu’elle t’honore !
Puissent tous ses voisins ensemble conjurés
Saper ses fondements encor mal assurés !
30 Et si ce n’est assez de toute l’Italie,
Que l’Orient contre elle à l’Occident s’allie ;
Que cent peuples unis des bouts de l’univers
Passent pour la détruire et les monts et les