Entretien avec roland et michel basaillon
Tordjman, paru dans Pratiques : linguistique, littérature, didactique, n°15-16, 1977, p. 52-
61.
(…) Jean-François Halté : Avec l’aide des appareils théoriques ou matériels dont on dispose, comment aborde-t-on le montage d’un texte classique, Le Tartuffe par exemple ? De l’intuition à la théorie
Roger Planchon : Voilà bien le genre de question auquel je n’ai jamais …afficher plus de contenu…
Du coup, j’ai eu envie de monter Le Tartuffe, une envie de dire à la scène : « Non, ce n’est pas comme ils racontent ». En lisant les quelques documents que l’on possède sur les mises en scène du passé — c’est une mémoire truquée et fausse, mais qui donne cependant une idée grossière des choses — j’ai découvert quatre ou cinq lectures essentielles du Tartuffe.
Vers 1850 par exemple, on joue à la Comédie-Française une version où Tartuffe apparaît comme un vilain méchant athée, glissé dans l’Eglise. Vers 1900, dans la même maison,
Coquelin monte Le Tartuffe et renverse la proposition précédente : « Tartuffe », dit-il, « …afficher plus de contenu…
» A partir d’une gravure, à partir de commentaires qui soutiennent des contre-vérités, je fais une mise en scène que j’estime plus proche de Molière. Parce que j’ai lu Freud, et que je connais un peu la psychologie contemporaine, je me dis que si le chasseur ne tire pas, c’est qu’il doit y avoir une explication secrète. Mais l’explication, elle est comme le nez au milieu de la figure, et depuis 300 ans on ne la voit pas. Initialement, c’est une intuition, une sorte de regard préparé, et puis après je suis capable de tenir une conférence sur l’homosexualité latente d’Orgon.
(…) Dans cette petite scène, Molière écrit une histoire profonde, une histoire que l’on