Fédéralisme
Du Nigeria au Soudan, des expériences contrastées
Marc-Antoine PÉROUSE DE MONTCLOS*
Le fédéralisme est-il la forme de gouvernement la plus adaptée pour répondre aux défis du multiculturalisme en Afrique ? D’aucuns semblent le penser lorsqu’il s’agit de gérer des grands ensembles étatiques, de décentraliser des pouvoirs autoritaires, d’apaiser des tensions internes ou de reconstruire des pays déchirés par des guerres civiles comme en Somalie1. Synonyme de transition démocratique, à défaut d’ouverture au multipartisme, l’adoption de systèmes fédéraux a suscité un regain d’intérêt au début des années 1990, notamment en Ethiopie. Les expériences contrastées du Nigeria et du Soudan laissent pourtant dubitatifs. Au Soudan, pays le plus important du continent par sa surface, la réorganisation fédérale de l’Etat, à partir de 1991, n’a pas convaincu les populations en rébellion dans le Sud, qui y ont vu une manœuvre de division du pouvoir central. Et au Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique, le décret instituant, en 1967, une fédération de douze Etats n’a pas empêché, trois jours après, la proclamation de l’indépendance du Biafra dans la région est. C’est seulement après-guerre qu’un tel cadre institutionnel a permis de calmer les appréhensions des minorités et de faciliter le processus de réconciliation nationale. A l’évidence, la comparaison du Nigeria et du Soudan s’impose lorsque l’on veut soumettre les projets fédéraux à l’épreuve des dures réalités politiques, sociales et économiques de l’Afrique noire. Les caractéristiques de ces deux pays, avec un Nord à dominante musulmane et un Sud chrétien ou animiste, ont d’ailleurs attiré l’attention
ACTUALITÉS
* Politologue, chargé de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), . 1) Elaigwu (1996), Woodward et Forsyth (1994), Tanda (1995). Pour une réflexion plus générale sur les mérites du fédéralisme ou de la partition, cf. Byman (2002), p. 173 ss.