Michel Tournier
Voici une œuvre protéiforme, d’une rare ambition, qui embrasse de nombreux domaines de l’activité humaine (de la marine à l’agriculture, de l’écriture à la vie sauvage, etc.) et s’interroge sur le sens de l’existence à travers un personnage - homme nu et dépouillé – qui va devoir se re-construire en trouvant une signification à sa nouvelle vie de solitaire. robinson après l’avoir appelée « L’île de la désolation » finit par la nommer « l’île Speranza ». Une différence notable puisque quand l’un (Sisyphe) ne fait que répéter l’absurde, l’autre (Robinson) met l’accent sur l’espoir.
robinson se retrouve seul survivant d'un naufrage sur une île déserte où il doit survivre avec ses seules ressources, avant de trouver un compagnon, Vendredi, et d'être sauvé par un navire de passage explore les implications intimes et psychologiques de la solitude, chez un homme entiérement livré à lui même. Après l'espoir d'être sauvé, le renoncement et la tentation de l'animalité, Robinson reconstruit, jusqu'à l'absurde, une société ordonnée et policée, dans un espace sans société. Un enfermement qui vole en éclat sous l'impulsion de Vendredi, d'abord vu comme un sauvage à civiliser, avant de devenir celui par qui Robinson acceptera sa propre personne.
Le récit s'ouvre sur le naufrage de la Virginie: Robinson Crusoé est sur la plage de l'île qu'il nommera Speranza. D'abord porté par le désir de fuir cette île perdue, il s'acharne à construire un radeau qui n'a de salut que l'idée. Robinson est hanté par "la peur de perdre l'esprit" (p. 23), terrifié par la solitude et le risque de perdre son humanité. le temps se disloque, les phases de désespoir se succèdent. Il tire de l'épave du bateau des reliques de civilisation qu'il organise pour recréer un monde humain dans un univers purement naturel. Dans un log-book, il consigne ses réflexions solitaires et ses souvenirs. Sans cesse, il lutte contre l'attrait d'une vie fangeuse,