Laisse-la slargir, cette sainte blessure Que les noirs sraphins tont faite au fond du coeur Rien ne nous rend si grands quune grande douleur. Mais, pour en tre atteint, ne crois pas, pote, Que ta voix ici-bas doive rester muette. Les plus dsesprs sont les chants les plus beaux, Et jen sais dimmortels qui sont de purs sanglots. Lorsque le plican, lass dun long voyage, Dans les brouillards du soir retourne ses roseaux, Ses petits affams courent sur le rivage En le voyant au loin sabattre sur les eaux. Dj, croyant saisir et partager leur proie, Ils courent leur pre avec des cris de joie En secouant leurs becs sur leurs goitres hideux. Lui, gagnant pas lents une roche leve, De son aile pendante abritant sa couve, Pcheur mlancolique, il regarde les cieux. Le sang coule longs flots de sa poitrine ouverte En vain il a des mers fouill la profondeur LOcan tait vide et la plage dserte Pour toute nourriture il apporte son coeur. Sombre et silencieux, tendu sur la pierre Partageant ses fils ses entrailles de pre, Dans son amour sublime il berce sa douleur, Et, regardant couler sa sanglante mamelle, Sur son festin de mort il saffaisse et chancelle, Ivre de volupt, de tendresse et dhorreur. Quel que soit le souci que ta jeunesse endure, Laisse-la slargir, cette sainte blessure Que les noirs sraphins tont faite au fond du coeur Rien ne nous rend si grands quune grande douleur. Mais, pour en tre atteint, ne crois pas, pote, Que ta voix ici-bas doive rester muette. Les plus dsesprs sont les chants les plus beaux, Et jen sais dimmortels qui sont de purs sanglots. Lorsque le plican, lass dun long voyage, Dans les brouillards du soir retourne ses roseaux, Ses petits affams courent sur le rivage En le voyant au loin sabattre sur les eaux. Dj, croyant saisir et partager leur proie, Ils courent leur pre avec des cris de joie En secouant leurs becs sur leurs goitres hideux. Lui, gagnant pas lents une roche leve, De son aile pendante abritant sa couve, Pcheur mlancolique, il