I. Préalables
a) une mise en perspective au sein de l’œuvre de l’auteur.Descartes analyse le désir de manière scientifique. Ce texte est issu de sa correspondance avec Chanut (lettre du 6 juin 1647) mais il est aussi par ailleurs l’auteur d’un texte sur les passions (Traité des Passions de l’Âme, 1649) qui les analyse de manière à montrer leurs causes physiologiques et psychique.Cette façon de procéder a pu surprendre chez le philosophe des Méditations Métaphysiques (1641) où était faite une distinction nette entre la substance pensante (l’âme) et la substance étendue (le corps). Néanmoins, la sixième méditation fait intervenir une troisième notion primitive qui est précisément « l’union de l’âme et du corps » que nous expérimentons de manière claire dans le sentiment, même si la pensée se doit de les distinguer. C’est de ce point de départ que part Descartes dans son traité. La lettre en question, quant à elle, semble distinguer les causes qui incitent à aimer qui résident dans le corps et celles qui résident dans l’esprit. Mais nous pourrons argumenter dans le sens d’une union plus profonde des deux.
b) Le problème que pose le texte.L’état amoureux semble quelque chose de communicatif, c’est-à-dire que le sentiment qui est d’abord inconscient semble se nourrir et s’amplifier dans la réciprocité qu’il aperçoit dans la personne aimée. Une dimension de fiction et de jeu devant réalité semble irréductible au sentiment amoureux qu’une telle spirale décrit. Comment se fait-il que Descartes puisse analyser cette passion de manière si scientifique et médicale (comme si passion signifiant pathologie), comme si cet affect n’était pas du tout spirituelle ?
c) la perspective de l’histoire des idées.La conception platonicienne du désir tel qu’exposé dans l‘Alcibiade décrit le devenir amoureux comme une contagion ophtalmique (par le regard). Le Banquet nous montre que la vérité du désir est au final le désir de vérité et qu’au-delà des différents objets singuliers du désir,