Faut-il réhabiliter l'autorité ?
Le 22 mai 1968, G. Pompidou déclare lors d'un discours «Le gouvernement ne peut dépendre pour sa vie et pour son autorité que du peuple». Au paroxysme de la plus grosse « crise d'autorité » dans le monde occidental, il est sage de la part de ce futur président d'associer le terme d'autorité au peuple en révolution. Mais qu'en est-il réellement de cette notion, si complexe qu'elle est encore aujourd'hui l'objet de confusion, et dont le sens est sans cesse détourné et utilisé à tort ?
L'autorité désigne avant tout le droit de commander et d'être obéi, le droit parfaitement légitime et consenti, car comme le précise Hannah Arendt dans son œuvre La crise de la culture, « Là où la force est employée, l'autorité proprement dite a échoué ». Faut-il donc réhabiliter cette autorité ? Mais réhabiliter signifie littéralement « rétablir dans son premier état ce qui a été déchu de ses droits », est-il sage de rétablir l'autorité qui prévalait les siècles derniers ? N'est-il pas préférable de tenter de trouver une forme d'autorité plus en accord avec la définition précédemment donnée, et d'ainsi respecter la définition du mot «réhabiliter » au figuré, qui est « faire recouvrer l'estime publique de quelqu'un ou quelque chose » ?
En somme : En quoi nos sociétés modernes ont-elles été l'objet d'une rupture, d'une « crise de l'autorité » au cours des siècles derniers ? Si cette rupture est incontestablement un bien pour le respect des libertés individuelles et de l'égalité, n'est-ce pas également l'origine d'une désolidarisation de la société qui mène à une individualisation toujours plus extrême ? D'où la nécessité de rétablir une forme nouvelle d'autorité, mais sur quoi fonder sa légitimité ?
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I_ La « crise de l'autorité », rupture au service de la démocratie et de la liberté
Premier renversement effectué au siècle des Lumières, avec l'émergence des premières contestations de l'autorité en place au nom de principes plus légitimes.