rédaction
tutoyant l’azur, il se révèle incapable de vivre
au sol, encombré par ses ailes immenses. Son
talent se révèle un handicap. Il devient alors le
souffre-douleur de ses contemporains. Le poème
repose sur cette horrible réversibilité. On oppose
d’un côté les groupes nominaux « rois de l’azur »
(v. 6), « voyageur ailé » (v. 9), « prince des
nuées » (v. 13) et, de l’autre, les couples d’adjec- tifs « maladroits et honteux » (v. 6), « gauche et
veule » (v. 9), « comique et laid » (v. 10) carac- térisant l’oiseau/poète « exilé au sol ».
Les trois autres textes ménagent une gradation :
il n’est plus question de bel oiseau mais d’ani- maux peu aimés. La chute du poème de Corbière
est explicite : « ce crapaud-là, c’est moi ».
Comme lui, il est laid, nu (« tondu »), enterré
vivant dans le froid, la boue et le manque d’air
(v. 1 : « dans une nuit sans air »). Le rejet des
vers 4-5 met en valeur l’horreur de cette situa- tion : « Tout vif/Enterré ». Nul ne voit son
« œil de lumière » et son chant reste solitaire.
De manière plus provocante, Maldoror nie son
humanité et revendique son animalité. Il se
veut fils de requin, frère des chiens et des tigres,
définitivement exclu d’un genre humain qu’il
déteste et méprise. Puisque Dieu, par haine, a
fait de lui une créature hideuse, il riposte en se
voulant davantage que les hommes.
Le locuteur de Poe parle avec un corbeau, oiseau
de malheur prophétisant un avenir sinistre, fait
de deuil éternel. Son unique refrain « Jamais
plus ! » est la négation même de toute perspec- tive de bonheur et d’éclaircie.
Dans tous les textes, le génie fait du créateur un
être différent, vivant dans une profonde solitude,
inadapté au monde, haï de ses contemporains ou
de Dieu.